Fait partie d'un numéro thématique: Pokchang. Image Consecration in Korean Buddhism / Consécration des images dans le bouddhisme coréen.
摘要
Qu’est-ce qui transforme une image de Bouddha en Bouddha ? Cette question a été vivement débattue depuis les années 1990. Les études afférentes sont centrées en particulier sur les rituels d’installation d’images bouddhiques dans des contextes ésotériques indo-tibétains et sur les objets que l’intérieur des statues bouddhiques chinoises et japonaises recèle. Il existe peu de preuves textuelles de tels rituels dans les textes religieux chinois et japonais, ce qui rend difficile l’examen des bases scripturaires et les contextes doctrinaux de ces pratiques. En revanche, la tradition coréenne de la « cache ventrale » (pokchang 腹藏), pratique consistant à insérer des objets à l’intérieur des images bouddhiques, est bien documentée à la fois matériellement et textuellement. Nous avons en effet la possibilité de comparer les dépôts dans la cache ventrale des statues bouddhiques des périodes du Koryŏ 高麗 (918-1392) et du Chosŏn 朝鮮 (1392-1910) avec un groupe de manuels rituels collectivement désigné sous le nom de Chosang kyŏng 造像經 (Soutra de la production d’images bouddhiques). Le contenu de la cache ventrale, tel qu’il est observé dans les manuels rituels et les objets découverts, a conduit les spécialistes à qualifier cette importante tradition rituelle comme étant une caractéristique du bouddhisme coréen. La plupart des spécialistes coréens la définissent comme une forme de consécration, un rituel permettant d’investir une image matérielle de la présence de la divinité. Ce point de vue correspond au modèle général d’explication en milieu universitaire occidental, qui décrit la consécration comme un outil rituel pour animer, vivifier et légitimer une image artificielle et inerte. L’émergence de cette pratique pendant la période du Koryŏ, que nous appelons une conception rituelle des images bouddhiques, marque un tournant important dans l’histoire des pratiques coréennes de fabrication d’images bouddhiques. Cette idée rituelle, dérivée du bouddhisme ésotérique indien tardif et transmise à la péninsule coréenne par les traductions d’écritures et de manuels rituels chinois des dynasties Song 宋 (960-1279) et Liao 遼 (907-1125), semble avoir joué un rôle essentiel dans la transformation de la perception des images par les bouddhistes coréens, qui a abouti finalement à la création et à la diffusion du rituel de la cache ventrale. Cet article a pour objectif de reconsidérer la structure générale de ce rituel à la lumière de la pratiṣṭhā, un rituel d’installation d’images dans le bouddhisme ésotérique indien. Ce rapprochement nous aide à mieux comprendre comment la formation du rituel de la cache ventrale et sa diffusion ont transformé à l’époque médiévale la perception coréenne des images bouddhiques et la pratique de fabrication de ces images.
目次
The Composition of Koryŏ Pokchang Deposits 51 Scriptural Bases for the Pokchang Ritual and the “Esoteric Turn” in Recent Scholarship 57 Rethinking the Logic of Pokchang in Light of Pratiṣṭhā 62 Concluding Remarks 72